De la nécessité de l’Art – 24e jour – Il disegno

Perché il disegno, padre delle tre arti nostre, architettura, scultura, e pittura, procedendo dall’intelletto, cava di molte cose un giudizio universale, simile a una forma, o vero idea di tutte le cose della natura, la quale è singolarissima nelle sue misure; di quì è, che non solo ne i corpi humani, e degl’animali; ma nelle piante ancora, e nelle fabriche, e sculture, e pitture cognosce la proporzione, che ha il tutto con le parti, e che hanno le parti fra loro, e col tutto insieme. E perche da questa cognitione nasce un certo concetto, e giudizio, che si forma nella mente quella tal cosa, che poi espressa con le mani si chiama disegno ; si puo conchiudere, che esso disegno altro non sia, che una apparente espressione, e dichiarazione del concetto, che si ha nell’animo, e di quello, che altri si è nella mente imaginato, e fabricato nell’idea.

Vasari, « le Vite »
Vinci, études de la tête de Leda, 1505 06_Vinci, Louvre, novembre 2019

Qu’est-ce qui oppose Florence et Venise, Raphaël et Titien, Poussin et Rubens, voire même Ingres et Delacroix ? Le grand débat qui parcourt des siècles d’histoire de l’art, entre disegno e colorito. Un débat initié à la Renaissance, à l’heure où les artistes en quête de reconnaissance mettent en exergue l’aspect intellectuel de leur travail, la nécessité d’une culture humaniste (d’où le thème qui émerge parallèlement de l’ « ut pictura poesis »), d’une connaissance des textes religieux, mythologiques et des sciences (géométrie, anatomie…), de règles ordonnant la matière. Ils tendent donc à s’écarter des corporations tandis que le recours à la couleur, donc aux pigments, les rapprochent de l’artisanat, du travail des teinturiers.

Au XVIe siècle, Vasari établit un parallèle entre dessin et dessein, le dessin étant le résultat visible du dessein, du projet de l’artiste (attitude, gestuelle, expression, composition), s’efforçant de saisir l’essence des choses, la couleur renforçant simplement l’effet produit. Il le considère comme « padre delle tre arti nostre », en continuité là avec la pensée de Ghiberti et Alberti. Mais pour l’école vénitienne, c’est la couleur qui donne l’illusion du vivant. Elle est l’expressivité, l’émotion, la sensualité et ce qui fait naître le plaisir du spectateur. En arrière-plan, s’opposent raison et émotion, essence et apparence, esprit et corps –l’idée primant sur l’image dans une conception néoplatonicienne caractéristique de l’humanisme renaissant-.

Au XVIIe, le débat se poursuit avec le développement des académies, le dessin étant institué comme fondement de la formation artistique. Quoique très sensible à la couleur, j’ai tendance à penser le dessin comme le fondement de bien des disciplines artistiques. De fait, les plus grands artistes, y compris ceux qui abandonnent au final le trait ou remettent en question dans leur œuvre certains principes de la formation artistique académique, qu’il s’agisse de la copie de l’antique ou de la perspective géométrique, sont bien souvent, au départ, de grands dessinateurs. C’est donc au dessin que je me consacrerai ce soir, un art qui ne fut pas d’emblée perçu comme tel puisque nombre de dessins de maîtres des XVe au XVIIe siècles, soit avant la prise d’autonomie du dessin- étaient avant tout des études préparatoires pour des peintures, des décors à fresques, des sculptures, des édifications (études de composition, études de détails, études anatomiques, dessins de proportions, dessins de perspective, copies d’antiques etc.), des dessins participant du processus créatif et en révélant les différents stades, ou ayant pour rôle d’emporter une commande (dessins de présentation), des réserves de motifs dans la tradition des livres de modèles médiévaux, permettant d’appréhender le réel, des études transmises de maîtres à élèves au sein des ateliers.

Michel-Ange, tête de satyre_Louvre, collection Mariette, aout 2019

Il n’en demeure pas moins que les amateurs éclairés (Mariette, Crozat, Jabach etc.), collectionneurs de feuilles, perçoivent vite la qualité intrinsèque du dessin et sa capacité unique à traduire la 1r pensée d’un artiste, souvent avec une incroyable vitalité, une spontanéité –l’artiste étudiant par exemple un motif sous différents angles, transcrivant sur le papier des éléments pris sur le vif, saisissant la vie, la présence, le mouvement- une beauté parfois un peu atténuée dans l’œuvre finale de même que le passage d’un modèle modelé en terre au marbre ou au bronze a tendance à figer quelque peu la représentation (ce que surmonteront toutefois les artistes les plus talentueux).

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