CARREAU DU TEMPLE, Paris, 22-25 Mars 2018

Nouvelle édition de Drawing now au carreau du temple, entre découvertes, confirmations et traditions. Si certaines galeries présentent toujours les mêmes artistes –qu’il n’est d’ailleurs pas désagréables de voir et de revoir-, sans doute pour satisfaire certains collectionneurs (Nash, Ernest Pignon Ernest, Desgrandchamps chez Lelong, Moninot chez Catherine Putman, Cognée galerie Oniris, Viallat chez Ceysson et Bénétière, les dessins de Vladimir Skoda galerie Catherine Issert, reprenant le motif de la sphère -au volume délicat, épuré mais sensible dans leurs irrégularités- cher au sculpteur etc.), le salon du dessin contemporain 2018 m’a néanmoins semblé d’une belle qualité.

Joachim Bandau galerie Maubert 
Radenko Milak_galerie les filles du Calvaire
Parmi les confirmations, j’ai principalement retenu le travail de Radenko Milak, l’un de mes principaux coups de cœur à la dernière biennale de Venise (pavillon bosniaque, palazzo Malipiero, https://www.facebook.com/instantartistique/posts/489437671389985), exposé en solo show par la galerie des filles du Calvaire. Un remarquable ensemble d’aquarelles et de dessins à la mine graphite poursuivant la série « The University of Disaster » dont beaucoup sont inspirés de Jérôme Bosch. Milak interroge l’imaginaire, les modes de lecture et le pouvoir –réel ou supposé- de l’image, les codes de représentation du réel. J’ai à nouveau particulièrement apprécié l’œuvre de Joachim Bandau défendu par la galerie Maubert et présenté en galerie en 2017 (https://www.facebook.com/instantartistique/posts/507906516209767). Les « aquarelles noires » de l’artiste, travail sur le temps et la décomposition du mouvement et des volumes proche de la chronophotographie, sont d’une incroyable subtilité.

Fabien Mérelle art Bartschi 
Mathieu Bonardet, galerie Jean Brolly
J’ai eu plaisir, par ailleurs, à retrouver quelques fusains de Mathieu Bonardet, tout en épure et délicatesse dans la déclinaison des gris et des formes géométriques en profondeur –et ce malgré un processus de création proche de la performance-, galerie Brolly. Ou encore les admirables dessins de Fabien Mérelle, autre ancien des beaux-arts de Paris, chez Art Bärtschi. Des dessins toujours d’une incroyable précision, n’occupant qu’une petite place dans une grande plage de réserve.
Ce qui importe, c’est de tenir l’idée. Elle doit ensuite s’incarner en une image. Tout est alors en place pour moi. J’oublie le projet pour me concentrer sur le geste. Il y a dans chaque dessin une infinité de petits gestes.
Fabien Mérelle
Ainsi que le travail, cette fois dessiné et non photographique, de Raphaelle Péria, galerie Papillon (https://www.facebook.com/instantartistique/posts/507938916206527). Le processus est le même, l’artiste procède par retrait, déchire précisément le papier, l’image, retirant toute trace de la nature tout en lui donnant une certaine épaisseur. La même galerie expose de surprenantes pièces également en relief de Kathryn Boch.
Parmi les découvertes, « Diplopie » (« double vision ») de Pia Rondé et Fabien Saleil, galerie Escougnou-Cetraro, peut-être plus proche de la sculpture que du dessin. Il s’agit en effet d’une approche technique tout à fait singulière, du dessin à l’eau forte sur plaques de zinc et du dessin sur plaques de verre, entaillant des surfaces de peinture noire ou miroitantes en argenture. Le dessin, loin de se cantonner à la surface, s’invite dans la matière même, la creuse, la vide. L’image se spatialise tandis que le duo repousse les limites des médiums qu’il emploie. Bien que la géométrie domine cette série de « dessins », les artistes s’inspirent de la nature, du vivant, le « cadre » rigoureux visant à tenir ensemble les formes du visible et de l’invisible.

Raquel Maulwurf 2017 18 
Simon Bilodeau? la mélancolie à l’infini 2017
La Livingstone gallery présente par ailleurs un solo show dédié au néerlandais Raquel Maulwurf. De vastes paysages au fusain d’une grande force et d’une grande délicatesse. Enfin, une série de pièces particulièrement puissantes dans leur volume, leur esthétique froide et leur quasi monochromie de noir, de blanc et de gris chez Art Mûr, sous la plume de Simon Bilodeau (« la mélancolie à l’infini »). Grilles, polyèdres placés sur une niche rigoureusement géométrique, les objets de Bilodeau semblent des vestiges silencieux se détachant d’un fond dense par le travail particulièrement soigné de la lumière et la muralité que revêt le support. Entre création et décomposition. A voir également Kim Minjung, Klaus Mosettig, Lena Diltmann, Takesada Matsutani, Jean Christophe Norman…A noter enfin dans cette édition 2018 un focus sur la bande dessinée avec quelques planches intéressantes de Sfar ou encore l’influence prégnante du cinéma sur certains dessinateurs tels que Mathieu Dufois (la galerie particulière).






































