Kawamata & Halijaj chez Mennour

GALERIE MENNOUR, Paris, Décembre 2017-Janvier 2018

Tadashi Kawamata, chef d’atelier à l’Ecole nationale supérieure des beaux-arts, métamorphose l’espace de la galerie Kamel Mennour en y établissant un immense nid constitué de plus de cent mille baguettes chinoises en bois de pin. L’installation se poursuit à l’extérieur sous la forme de petites structures nichées aux fenêtres de l’hôtel particulier qui abrite la galerie. Une œuvre collective, en matériau pauvre, entre art et architecture, conçue exclusivement pour le lieu, et conduisant à le réinventer.

Une œuvre fondée, comme la musique de Cage, sur le hasard comme façon de contrer les idées d’ordre et d’organisation, le processus primant sur le résultat, le changement, l’instabilité rendant compte de l’impermanence du monde. Le nid quant à lui n’est pas pensé comme lieu de repli mais comme réaction à un espace donné. Le résultat n’en est pas moins tout à la fois impressionnant, poétique, irrégulier, rythmé et fragile.

La même galerie accueille parallèlement un ensemble de nouvelles pièces du kosovar Petrit Halilaj, très différentes des monumentales mites de tissu remarquées à la dernière biennale de Venise même s’il s’agit toujours d’un travail sur la mémoire, mémoire collective et mémoire personnelle entrelacées. Si l’installation « abetare », papier peint inspiré d’un manuel de lecture dans lequel l’artiste apprit l’albanais enfant à l’heure où la population albanaise était opprimée par le gouvernement serbe, ne m’a guère émue, il en est tout autrement de l’installation qui investit le sous-sol de la galerie. L’artiste a réuni une douzaine de tables d’écoliers issues d’une école primaire du nord du Kosovo où il vécut. Il a étudié les dessins, gravures et griffonnages laissés par les enfants sur ces tables et les a transposés sous la forme de sculptures en acier suspendues, posées, accrochées dans l’espace de la galerie. L’œuvre, d’une grande efficacité visuelle et d’une réelle qualité technique et esthétique, renvoie chaque visiteur à ses propres souvenirs d’enfance au travers de dessins familiers, noms de célébrités du monde du sport ou de la musique, messages d’amour…- un moment de liberté et de développement de soi- tout en évoquant l’histoire du Kosovo par la représentation d’armes à feu, la présence des noms de groupes militaires opérant alors au Kosovo. Une belle idée magistralement mise en forme…

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Author: Instant artistique

Conservateur de bibliothèque. Diplômée en Histoire et histoire de l'art à l'Université Paris I et Paris IV Panthéon-Sorbonne. Classes Préparatoires Chartes, École du Patrimoine, Agrégation Histoire. Auteur des textes et de l'essentiel des photographies de l'Instant artistique, regard personnel, documenté et passionné sur l'Art, son Histoire, ses actualités.

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