MUSEE RODIN, Paris, Mars-Octobre 2017
A l’occasion du centenaire de la mort d’Auguste Rodin, Anselm Kiefer propose un superbe hommage à l’artiste en son musée. Certes, l’artiste, objet d’une imposante rétrospective au centre Pompidou l’an dernier et qui présente actuellement une remarquable installation dans le cadre de la singulière et passionnante exposition « diorama » au palais de Tokyo est quelque peu incontournable ces derniers temps sur la scène parisienne. Néanmoins, cette variation d’après l’ouvrage du maître, « les cathédrales de France », sous la forme de peintures monumentales de plomb et de peinture, de livres massifs aux effets marbrés et de vitrines, mérite le détour.
Le dialogue entre les deux artistes a commencé en 2013 autour « [des] cathédrales de France », de Rodin. La première salle de l’exposition est particulièrement impressionnante, avec trois déclinaisons peintes des cathédrales -de très grands formats, mélange de plomb de la cathédrale de Cologne et de peinture- ponctuées de vitrines. Dans une gamme toujours terreuse et quelque peu oppressante, la matière se répand, se craquèle, se meurtrit, épaisse et saturée de pigments, laissant paraître néanmoins des « tours-cathédrales » assez majestueuses.
Les deux autres salles présentent des livres de l’artiste, pour beaucoup aux effets marbrés bien qu’il ne s’agisse que de plâtre, sur la même thématique des cathédrales, ainsi que des vitrines inédites, lieux de mystère et de métamorphose. Dans les livres toutefois la thématique de la cathédrale évolue du motif architectural à l’image de la femme, comme chez Rodin. Kiefer s’est particulièrement penché sur les dessins érotiques du maître et ses femmes-cathédrales dialoguent quelque peu avec les aquarelles de Rodin. Des femmes nues se confrontent à la silhouette menaçante et rouge d’un clocher ou semblent se lover dans une rosace…Entre sacré et profane. Pour les deux artistes, l’idée et la forme participent de la matière, quelle qu’elle soit. L’un comme l’autre est attiré par l’accident, le fragment, l’exploration du matériau jusqu’aux mutations les plus audacieuses, la trace du processus de création laissée dans la matière. Une même quête de sens, d’authenticité et de sincérité. A voir impérativement !
