LA MONNAIE, Paris, Mars-Avril 2016

Pour les amateurs d’arte povera, un bel ensemble d’oeuvres de Jannis Kounellis à la Monnaie de Paris. De remarquables chevalets de fer supportant des plaques d’acier -hommages aux peintres dont l’artiste a inscrit la date de naissance au dos : Delacroix, Van Gogh, Picasso etc.-, des fragments de bateaux, des balances suspendues dans l’espace portant du souffre ou de la verrerie, un sac en toile noir superbement noué, des lits de camps couverts de fer et enveloppés dans des couvertures militaires, des vêtements détournés, un lampadaire de couteaux, des morceaux de charbon attachés sur des plaques de fer…
Kounellis, sans titre, 2016 Kounellis, sans titre, 2013
L’artiste se définit comme peintre et refuse le terme d’installation même si la mise en espace des objets, des matériaux – le charbon, le fer, le bois, le feu…-, y ressemble quelque peu.
Kounellis, sans titre, 1993 Kounellis, sans titre, 2012
Comme les autres acteurs de l’arte povera, Kounellis s’intéresse davantage au processus de création qu’à l’objet fini. La « pauvreté » de ce type de création procède tant des matériaux choisis, « bruts », pour reprendre le titre de l’exposition, que du rejet de la société de consommation et de certains acquis culturels bien que l’artiste s’inscrive pleinement dans l’histoire de l’art avec des références directes à Masaccio ou au Caravage dans ses textes.
Germano Celant parle de l’art povera comme d’un processus de « déculturation » qui « consiste à enlever, à éliminer, à réduire au minimum de termes, à appauvrir les signes pour qu’ils ne soient plus qu’archétypes ». Kounellis s’intéresse particulièrement aux signes de l’ère industrielle qu’il expose en l’état ou détourne, le charbon et le fer en étant pour lui emblématiques voire symboliques. Si l’homme semble absent de ces oeuvres, leur échelle elle, est toujours humaine et interroge le visiteur sur les dispositifs formels et « picturaux ».



