MUSEE PICASSO, Paris, Octobre 2016-Février 2017

La confrontation entre Picasso et Giacometti au musée Picasso se révèle très réussie. C’est l’occasion de voir quelques oeuvres des deux artistes peu exposées en provenance du musée Picasso et de la fondation Giacometti, notamment les oeuvres étonnantes, tant peintes que sculptées, des débuts de Giacometti et de sa période surréaliste, peut-être un peu aux dépens des oeuvres les plus emblématiques du sculpteur telles que l’homme qui marche.
Du parcours thématique, j’ai particulièrement retenu la salle consacrée au mort et au vif avec les rapprochements impressionnants de certaines natures mortes au crâne de Picasso ainsi que son crâne en bronze et de la tête sur tige de Giacometti, ou encore le parallèle entre la mort de Casagemas de Picasso, de la période bleue, et celle de Braque dessinée par Giacometti.
La salle consacrée aux muses des artistes, à savoir Dora Maar pour Picasso et Annette pour Giacometti, est également assez éblouissante : elle propose une belle série de portraits peints de Dora Maar à l’huile ou au pastel ainsi qu’un remarquable ensemble de bustes en plâtre ou en bronze d’Annette qui témoigne par la diversité de traitement de l’intensité des recherches du sculpteur…
Il en est de même de la superbe mise en relation de la toile « l’ombre » de Picasso et de « l’homme qui marche » de Giacometti…l’ombre qui se dessine dans la toile pourrait être celle du marcheur, anonyme, sombre, fin, de longs bras pendant le long du corps. Quant à la salle dédiée au retour du réalisme chez les deux artistes à travers notamment la thématique animale, elle propose d’autres rencontres improbables et cependant efficaces telles celles du chat et du chien longilignes de Giacometti et de la chèvre composite de Picasso.
Les rapprochements formels et techniques fonctionnent très bien, qu’il s’agisse des autoportraits, de la pratique du dessin sur des feuilles de journal par les deux artistes, de la femme égorgée de Giacometti voisinant avec des toiles des années 1930 de Picasso où les membres des corps sur la plage semblent pareillement déstructurés, des objets surréalistes de Giacometti confrontés à certains collages ou formes à plat de Picasso, de l’influence des arts premiers sur les deux artistes ou encore de la confrontation de leurs groupes sculptés, à savoir les sculptures aux allures de totem des « baigneurs » de Picasso face à « la forêt » de Giacometti etc. Certes, le style de Giacometti se détache rapidement de l’influence de Picasso et s’affirme d’une grande singularité avec son travail sur le socle et l’affinement, l’effacement progressif du corps, la trituration de la matière mais les parallèles thématiques demeurent pertinents tout au long de l’exposition. A voir!



