MUSEE JACQUEMART-ANDRE, Paris, Septembre 2016-Janvier 2017

Exposition de très belle tenue consacrée à Rembrandt au musée Jacquemart André. Elle propose un remarquable ensemble de dessins, gravures (eaux fortes) et peintures du maître, et exclusivement du maître (pas d’oeuvres d’atelier). Elle porte par ailleurs assez bien son nom « Rembrandt intime », par la mise en exergue des modèles familiers de l’artiste (ses femmes Saskia et Hendrickje, son fils Titus) et de quelques autoportraits, sans toutefois exclure les thématiques bibliques essentielles pour Rembrandt et les oeuvres, beaucoup plus austères et probablement plus contraintes, de commande.

Rembrandt, l’annonce aux bergers 
Rembrandt, Ecce Homo
Certaines pièces de l’oeuvre gravé, notamment « l’annonce aux bergers » et « la résurrection de Lazare », sont époustouflantes de maîtrise et de finesse dans le traitement des détails et du clair obscur. J’ai relevé par ailleurs quelques rapprochements intéressants entre eau forte et peinture (« Ecce homo »), révélant la grande dextérité technique de l’artiste, particulièrement comme graveur : le traitement se fait alors beaucoup plus précis et détaillé -notamment dans la représentation des personnages, leurs visages et expressions-, les contrastes lumineux, beaucoup plus intenses.

La grande maîtrise technique de l’artiste se révèle également en peinture, le pinceau pouvant rendre un détail de raffinement d’étoffes et de motifs assez impressionnant, comme dans la robe de « Saskia en Flore » ou encore la psychologie d’un personnage par le traitement « réaliste » et aucunement idéalisé des traits, des expressions, des rides de la peau (homme en costume oriental), tandis qu’il floute la matière jusqu’à l’abstraction, dans un traitement quasiment pré-impressionniste, par exemple dans le portrait d’Hendrickje Stoffels.
L’oeuvre dessiné est quant à elle surprenante par la légèreté et le caractère extrêmement esquissé et minimal du trait. Enfin, certaines oeuvres permettent de suivre l’évolution du traitement de l’ombre et de la lumière au fil de la carrière de l’artiste : traitement caravagesque des débuts, intégration beaucoup plus grande et diffuse par la suite, toujours toutefois dans la même gamme dominante de bruns chauds chère à l’artiste. On peut observer parfois ces évolutions sur une même thématique telle que celle des Pèlerins ou du repas d’Emmaus : les différentes oeuvres sur ce thème confirment toute l’originalité de la toile du musée Jacquemart André à la fois par la singularité de la composition (profondeur donnée par la présence d’un personnage secondaire en arrière-plan, décentrement du Christ) et l’incroyable traitement par l’ombre de la silhouette divine. Cette richesse et qualité de composition, souvent construite sur une diagonale créant dynamique et profondeur, se retrouve tout au long de l’exposition. A voir et revoir en dépit de l’affluence et de la grande sobriété scénographique du lieu.









